Médecins de l’Éducation nationale : Espoirs et interrogations

Éditorial (juillet 2017) de la lettre aux adhérent.es du SNAMSPEN/Sgen-CFDT.

Espoir, car de nombreux, articles et rapports parus récemment témoignent de notre rôle indispensable comme acteurs de santé et de bien être, et de notre expertise auprès des élèves notamment les plus fragiles.

travailler enfin en interministériel

Espoir aussi car les deux audiences (séparées) du SNAMSPEN/Sgen-CFDT le 5 juillet dernier au ministère de la santé et au ministère de l’Éducation Nationale rendent compte d’une volonté de travailler enfin en interministériel et en priorité pour assurer la visite médicale des 6 ans en réinterrogeant les collaborations entre infirmiers et médecins.

L’audience au ministère de l’Éducation nationale a permis au SNAMSPEN de faire un état des lieux complet des difficultés actuelles tant pour assurer les missions qui sont celles de la santé scolaire, que pour assurer un accueil bien traitant des élèves handicapés.

Espoir aussi, car si les médecins de l’Éducation nationale sont les seuls personnels de l’institution à ne pas avoir vu la signature de leur décret de revalorisation de carrière à travers le PPCR (qui semble avoir de toute façon un avenir incertain), on peut imaginer, voire espérer, que sous l’impulsion des différents rapports, des difficultés remontées par les syndicats, les usagers et les sociétés savantes, une revalorisation exceptionnelle et prioritaire, ainsi que des mesures de recrutement efficaces (au moins de contractuels) pourront peut être voir le jour au ministère de l’Éducation nationale.

Enfin, espoir, car la volonté du ministère de la santé est de faciliter les collaborations entre tous les acteurs de santé sans les imposer, mais sans que ne soient perçus à l’issue de l’audition avec le ministère de la santé, les moyens de ces organisations novatrices (tout semble possible en termes de conventions entre acteurs et lieux de consultations, y compris pour les acteurs de prévention collective!)

Interrogations, car la volonté du ministère de la santé est de développer en priorité la prévention faite par les médecins traitants, en rémunérant mieux les actes de prévention.

le soin c’est dorénavant la prévention

Interrogations, car de façon nouvelle, on nous annonce que le soin c’est dorénavant la prévention : bonne nouvelle pour nous ! Nous sommes élevés au rang des médecins qui soignent en réalisant au quotidien nos actes de prévention!

Interrogations, car on sait que les actes de prévention, réalisés en dehors de la PMI et de la santé scolaire, sont toujours centrés sur les mêmes cibles : la recherche de pathologie, la nutrition, l’exercice physique …

Mais le bilan de 6 ans devrait désormais être fait aussi par les médecins libéraux (quid de la formation pour faire les tests des apprentissages et du temps pris pour réaliser la totalité des items de l’arrêté du 5 novembre 2015 ?).

Interrogations, car l’usager va-t-il se rendre chez son médecin traitant pour bénéficier d’une visite de prévention (faut-il qu’il soit persuadé de son importance) ou attendre une entrée par le soin ? Dans cette éventualité, quel sera le temps que le médecin exerçant en libéral (rare et débordé…) pourra y consacrer ?

Interrogations aussi, car les politiques ne semblent vraiment pas concevoir la nécessité de d’assurer le nombre des spécialistes en charge de cette prévention qui consiste à éduquer et à s’assurer des compétences psychosociales, qui restent à développer dès le plus jeune âge, de façon cohérente et équitable pour chaque usager. Ils ne semblent pas non plus vouloir se doter des moyens propres à protéger voire garantir l’estime de soi et l’épanouissement de chaque enfant à travers sa réussite scolaire ou son projet de vie. Nous savons que l’échec scolaire et la perte d’estime de soi sont générateurs de conduites à risque, de troubles psychiques, de conduites et de conséquences non favorables à la santé.

Nous savons aussi que seuls des médecins ayant une parfaite connaissance du lieu de « travail » de l’enfant et de l’adolescent peuvent diagnostiquer les troubles liés à l’école et entravant la réussite et l’épanouissement. Nous savons aussi que l’école peut être génératrice de troubles et de pathologies et que la bientraitance au sein de l’institution scolaire reste à construire avec toute la communauté éducative.

Nous savons aussi que nos collègues infirmiers en charge de l’éducation à la santé, sous l’autorité des chefs d’établissement, peinent à offrir à chaque enfant et adolescent, un parcours éducatif en santé cohérent de la maternelle au lycée.

coordonner actions et acteurs

Il s’agit bien là finalement de coordonner actions et acteurs, suivant des diagnostics de besoins en santé. Les médecins de l’éducation, en dehors de leurs actions de prévention liées aux diagnostics des troubles et du mal être, ont toute leur place dans cette coordination des acteurs depuis la maternelle au lycée car ils sont les seuls personnels de l’Éducation nationale à accompagner les enfants sur tout le cursus scolaire et à pouvoir arbitrer librement les interventions utiles et nécessaires suivant les besoins de santé individuels et communautaires diagnostiqués.

Interrogations finalement, sur ce frein exercé par notre gouvernement en marche, qui résiste à concevoir la prévention construite comme le système de soin : à disposition de chaque citoyen, dès la naissance, avec ses médecins généralistes et ses médecins spécialistes, ces acteurs multiples, pour des actes différents et variés, régit par des bonnes pratiques, et qui ne doit pas souffrir des aléas budgétaires pour atteindre son véritable objectif : améliorer la qualité de vie en bonne santé et l’épanouissement de  chaque citoyen quels que soient sa condition sociale et son lieu de vie.

La prochaine année scolaire sera assurément riche des travaux déjà enclenchés par les ministères de l’éducation nationale et de la santé : nous avons bon espoir qu’ils apportent les améliorations nécessaires à notre exercice professionnel.

Le SNAMSPEN/Sgen-CFDT, soutenu par le Sgen/CFDT et l’Union Confédérale des Médecins Salariés de France a montré aux deux ministères la volonté des médecins scolaires à assurer un service public équitable qui ait du sens.

Le SNAMSPEN a revendiqué la place des médecins scolaires comme acteurs de la politique de santé au sein de l’éducation nationale et non plus comme prestataires de service de l’éducation nationale. Nous avons l’intime conviction d’avoir été entendus.