Lors du conseil supérieur de l'éducation du 5 juin 2025, la CFDT Éducation Formation Recherche Publiques s'est exprimée sur la convention citoyenne sur les temps de l'enfant et a dénoncé l'impact des restrictions budgétaires sur le travail.
Le Président de la République a souhaité qu’une convention citoyenne réponde à la question « Comment mieux structurer les différents temps de la vie quotidienne des enfants afin qu’ils soient plus favorables à leurs apprentissages, à leur développement et à leur santé ? »
C’est une question importante et pertinente qui n’est pas nouvelle. La réforme des rythmes de 2013 était une réponse limitée au premier degré. Elle avait le défaut principal de ne pas prendre en compte les conséquences sur l’organisation du travail et ne pas poser la question du temps de travail des enseignants. Ces deux sujets RH, pourtant incontournables, doivent être traités par un employeur dès lors qu’une réforme engendre des transformations.
Pour le reste elle avait eu le mérite de mettre autour d’une même table les différents acteurs de l’enfance, au niveau local et de les faire construire ensemble des projets éducatifs de territoire. Mais cela ne suffit pas, il faut ensuite une coopération loyale et soutenable dans le temps entre l’État et les collectivités.
Depuis 2017 et la création d’une dérogation, devenue la règle commune, jusqu’à la diminution puis la suppression des aides aux collectivités, c’est un retour en arrière quasi total qui a été décidé par la majorité présidentielle.
Quelle est la cohérence d’y revenir aujourd’hui ? Il sera d’autant plus difficile de convaincre les acteurs d’y retourner une seconde fois.
À moins que cette convention citoyenne ne serve d’alibi pour le projet présidentiel de réduire les vacances scolaires ? La question du calendrier des vacances est pourtant pertinente. Nous en avons ici débattu, et avons construit un consensus pour une proposition permettant une meilleure répartition sur l’année de l’alternance congés/école.
La réflexion sur les congés d’été ne peut-être déconnectée de données extérieures à l’Éducation au premier rang desquelles figure le changement climatique.
Depuis quelques années, les épisodes thermiques extrêmes en juin, juillet et septembre sont monnaie courante. Comment dès lors faire classe, passer des examens alors qu’il peut faire jusqu’à 40 °C dans certaines classes ? Comment aller en récréation alors que beaucoup d’écoles et d’établissements ne disposent pas d’espaces verts ombragés permettant de fuir la cour bitumée ? La question ne se posera pas de la même manière à Montpellier ou à Brest. Il faut donc offrir des possibilité d’adaptation locale, et un dialogue social respectueux pour décider de ces adaptations.
Enfin, poser la questions des temps sans interroger ce que l’on fait dans les classes n’aurait pas de sens, car le temps passé ne dit rien de la charge qui pèse sur les élèves et donc les enfants ou du climat scolaire. Il est indispensable d’élargir la focale. Il faut réfléchir aux contenus des programmes, à la manière d’évaluer, à la cohérence avec les objectifs d’inclusion, de lutte contre les inégalités.
Que veut-on apprendre aux jeunes générations et dans quel but ?
C’est en ce sens que la CFDT Éducation Formation Recherche Publiques continue de porter une convention citoyenne sur l’Éducation qui aborde l’ensemble des enjeux éducatifs.
Comment peut-on espérer une réflexion cohérente d’ensemble quand on voit des décisions budgétaires prises les unes après les autres, les unes à coté des autres, sans cohérence mais qui toutes impactent le travail des agents sans que ce ne soit anticipé ou mesuré.
Je prendrais deux exemples.
Premier exemple NEFLE, notre école faisons la ensemble, grand projet du Président de la République pour impulser des innovations pédagogiques locales dans le cadre du CNR. Les robinets de financement sont coupés. Que reste-t-il de l’engagement de 500 millions d’euros sur 5 ans dans le fond d’innovation pédagogique ?
Nous avons de nombreux retours de projets qui avaient été validés et qui ne peuvent se réaliser faute de financement, des projets validés et financés, qu’il a fallu interrompre d’urgence, des intervenants à qui l’on dit qu’ils ne seront pas payés.
Autant d’investissement personnel et de temps de concertation, pour construire puis conduire un projet qui sont piétinés par des politiques budgétaires de rabots qui érodent un peu plus la confiance dans les politiques conduites et l’envie de se lancer dans de nouveaux projets. Et double peine, il revient à ces personnels méprisés d’expliquer aux élèves, aux parents, aux partenaires, l’arrêt des projets et de supporter leur désapprobation.
Deuxième exemple, le Pacte. Il est à nouveau réduit l’an prochain. Il sera réservé exclusivement pour les remplacements de courtes durées et le dispositif « devoirs faits ». Il sera de plus en plus difficile, voire impossible, de rémunérer des investissements dans les projets pédagogiques. Les impacts en termes d’éducation citoyenne, de mise en œuvre d’une politique éducative qui concoure à un climat scolaire apaisé seront nombreux et désastreux.
Cette absence totale de cohérence entre le discours politique et médiatique a un coût humain désastreux.
Il est payé par les élèves et les familles à qui on délivre de moins en moins un service d’éducation ambitieux.
Il est payé par les enseignants qui ne comptent pas leur temps pour construire des projets et s’engager dans des dispositifs d’aide aux élèves.
Il est payé par les équipes de direction qui sont de plus en plus nombreuses à alerter sur l’épuisement, la perte de sens et la démotivation face aux difficultés et aux injonctions paradoxales.
La CFDT Éducation Formation Recherche Publiques refuse ce mode de gouvernance qui ne respecte ni les agents ni les usagers.
Nous revendiquons que le système éducatif soit abondé financièrement à la hauteur des défis immenses qui sont les siens.